Le taxi avait laissé Tony dans le quartier Vostok au pied du bloc 8. Il était loin le temps glorieux du programme spatial Vostok et le quartier faisait triste figure. La masse grise de l'immeuble lui barrait la route comme une barrière infranchissable hérissée de bow windows hétéroclites bricolés de bois ou de tôles aux couleurs délavées.
Mais Tony commençait à connaitre la géographie des lieux et il s'engagea d'un pas vif dans le passage vouté qui menait dans la cour. La géographie de la ville était toujours la même. Au milieu de la steppe jaunie les prisonniers avaient construit, bloc après bloc, des microdistricts. Chaque micordistrict s'articulait autour d'une barre de béton formant carré. Au milieu de chaque carré se cachait une cour. Chaque cour abritait quelques arbres, d'énormes tuyaux de chauffage sur pilotis formant d'extravagants coudes pour franchir des obstacles et laissant s'échapper des nuages de vapeur, et quelques aires de jeux déglinguées et rouillées pour les enfants. Un vrai rêve de Gosplan.
Tony se dirigea vers la boutique du bas pour s'approvisonner en bouteilles d'eau. Il avait appris à prendre ses précautions et en prenait toujours trois, de cinq litres chacune, pour pouvoir alimenter aussi la baignoire en cas de coupure d'eau. Quand Slava était là celui çi lui donnait un coup de main pour les monter dans l'appartement au troisième.
"Ne pas oublier les graines pour Mizzi" se dit-il. Le passerin était son seul lien avec le monde d'avant et il fallait le protéger de cet environnement difficile. Il lui avait aménagé une petite cage dans le bow bindow où il avait l'abitude d'aller fumer ses cigarettes. Mizzi fumait avec lui.
Tony savait qu'il ne fallait pas trainer. Les dizaines de milliers d'euros et de dollars qu'il cachait dans une poche intérieure sur son ventre étaient trop tentants.
Il avait pris grand soin de s'habiller le plus simplement possible pour ne pas avoir l'air trop occidental mais ses allées et venues en taxi depuis plusieurs semaines n'avaient pas dù passer inaperçus.
Et puis il y avait la milice du quartier. Slava lui avait dit que c'était surtout d'eux qu'il fallait se méfier.
1 comment:
et je continue de suivre avec grand intêret Tony,Slava...tes mots, ton style s'articulent habilement comme un "gosplan" mais avec des travellings si précis que j'ai parfois l'impression d'être devant un écran de cinéma... le décor, l'atmosphère, le parcours, les sentiments de Tony , tout y est... j'ai même entendu Mizzi chanter dans sa petite cage... *_*
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